LMA 72


Les étirements

 

Apparu dans les années 80 et très vite popularisés dans le milieu sportif, les étirements sont devenus des éléments importants dans le cadre de la préparation physique et sportive. 
Mais dès les années 90, des études ont commencé à montrer que ces derniers pouvaient se révéler sans effet, voir sources de blessure ou de perte de force musculaire. 

Nous allons voir qu’il n’y a pas une, mais des formes d’étirements, avec des indications et des contre-indications. 


1.    Définitions

Les étirements, ou stretching, consistent en une « action d’allonger. L’étirement peut-être passif (réalisé par traction, manuelle ou non) ou bien le fait d’une action interne, c’est l’étirement actif ou auto-étirement » . 
Pour être pratiqué efficacement et sans risque, il est préférable d’avoir un minimum de connaissance théorique.  

L’étirement d’un muscle met en jeu ses fibres musculaires, son ou ses tendons, le tissu osseux auquel il s’accroche et ses aponévroses qui l’enveloppent. 

Le principe général sera toujours le même, à savoir mettre la distance la plus importante possible entre le point d’insertion et le point de terminaison d’un muscle. 


2.    Les différents types d’étirements

a.    Etirements passifs

Ils consistent en une mise en allongement passive d’un muscle ou d’un groupe musculaire. Ils sont à pratiquer de façon douce, progressive, sans à-coups, et sans douleur.
Pour cette technique, on privilégiera toujours la durée de l’étirement à son intensité, même si les dernières études tendent à montrer que la durée optimale se situe entre 15 et 30 secondes . 
La position choisie pour réaliser l’étirement devra être la plus confortable et la plus stable possible, tout en assurant un étirement correct du muscle. Il peut être possible de recourir à l’aide d’une tierce personne afin de réaliser l’étirement. 

Le point primordial de cette méthode est l’écoute de ses sensations. En effet, il faut sentir le muscle se détendre, mais sans jamais générer de douleur qui est un signe de souffrance musculaire. 

b.    Étirements balistiques

Dans cette technique, l’étirement devient plus actif. 
Le principe de cette technique est de donner de petits à-coups dynamiques pour étirer un muscle ou un groupe musculaire. 
Le principal défaut de cette méthode est qu’elle peut facilement mettre en jeu le réflexe myotatique (contraction réflexe d’un muscle en réponse à son propre étirement) du muscle à étirer, ce qui est contre-productif. 
Cette méthode a été très largement abandonnée car elle est source de déchirure musculaire en cas de vitesse ou d’amplitude de gestuelle trop élevée . 


c.    Étirements de type PNF (Proprioceptive Neuromusclar Facilitation)

i.    Contract relax technique

Également appelée en français technique du contracté-relâché-étiré. 
Le principe est de placer passivement un muscle en position longue jusqu’à la sensation d’étirement et ce pendant 6 secondes.
Une fois la position d’étirement atteinte, il faut demander une contraction isométrique (sans mouvement) du muscle contre résistance pendant 6 secondes. Ensuite, on demande un arrêt de la contraction du muscle tout en maintenant la position. Enfin il faut augmenter légèrement l’étirement initial, toujours en respectant les règles de base (cf étirements passifs), là encore pendant 6 secondes.

Exemple, pour étirer un quadriceps, on place la hanche en rectitude et le genou en flexion, en étirement, pendant 6 secondes. Puis on demande une extension du genou avec une résistance qui va bloquer le mouvement, toujours sur 6 secondes. On demande l’arrêt de la contraction et on maintient la posture 6 secondes. Enfin, on augmente légèrement l’étirement pendant 6 secondes.


ii.    Contract relax antagonist contract ou CRAC

Le principe est là-encore de placer passivement un muscle en position longue jusqu’à la sensation d’étirement.
A partir de cette position, il faut demander une contraction au muscle ou au groupe de muscle antagoniste (opposé) au muscle étirer.
Exemple : si le but est d’étirer le quadriceps, il faut placer la hanche en rectitude et le genou en flexion maximale jusqu’à ressentir l’étirement du quadriceps. Puis il faut réaliser une contraction des ischio-jambiers (muscles de l’arrière de la cuisse permettant de fléchir le genou) pendant 10 secondes afin de majorer l’étirement du quadriceps. Enfin, on observe une phase de repos d’une dizaine de secondes.

Il semble que ces deux techniques soit les plus efficaces pour améliorer la souplesse musculaire .


d.    Etirements activo-dynamiques

Ces étirements se décomposent en 2 temps.
Dans un premier temps, on place le muscle en position longue mais sans entrer dans l’étirement, et ce pendant 8 secondes. 
Dans un second temps, on relâche l’allongement du muscle et on demande immédiatement des contractions brèves et dynamiques pendant 8 secondes. 
Cet exercice s’apparente plus à de la pliométrie qu’à un réel étirement au sens strict du terme. 


3.    Etirements et échauffement

Les étirements musculaires ont tendance à diminuer l’apport sanguin dans le muscle par compression des vaisseaux sanguins . Cela aura pour conséquence de baisser l’apport en oxygène et en nutriments nécessaires au muscle pendant la phase d’échauffement et donc de limiter sa « montée en température ». 

Ils auront également tendance à diminuer la sensibilité du fuseau neuromusculaire (FNM), ce qui aura pour conséquence de faire baisser la force et la réactivité du muscle à l’effort . Une autre conséquence de cette baisse de sensibilité du FNM sera l’élévation du seuil de douleur des fibres musculaires, risquant de masquer des micro-traumatismes et donc des blessures plus grave à court et moyen terme .
Cela va également altérer la coordination motrice à cause de la modification de perception et de remontée des informations proprioceptives. 

Un autre effet négatif des étirements musculaires est le creeping. Il consiste en une réorganisation linéaire des fibres de collagènes contenues dans les tendons, en lieu et place d’une organisation en torsade . Cela diminue la capacité du tendon à emmagasiner et à restituer de l’énergie à l’effort de l’ordre de 3 à 8%, risquant d'entraîner des blessures par sur-sollicitation musculaire.  
 
Enfin, les étirements sont majoritairement passifs, donc non fonctionnels par rapport au mode de fonctionnement musculaire à l’effort qui est essentiellement pliométrique.  

Pour toutes ces raisons, il est donc possible de conclure que les étirements ne sont pas à faire avant un effort musculaire, ni avant, ni pendant, ni à la fin de l’échauffement.


Cas particulier des étirements activo-dynamiques :

De par leur mode pliométrique et leur faible temps de mise en allongement sous-maximal, ce sont les seuls étirements qui peuvent être réalisés lors d’un échauffement.
Ils sont en revanche beaucoup moins indiqués en dehors de cette phase. 


4.    Étirements et récupération

Comme pour l’échauffement, la baisse de perfusion sanguine du muscle par compression des éléments vasculaires entraine une diminution de la qualité de récupération musculaire. Le sang circulant moins bien, les déchets produits sont moins bien évacués et éléments nécessaires à la bonne cicatrisation arrivent moins bien. Les étirements n’ont donc aucun effet sur les courbatures d’après effort .

L’activité sportive est source de micro-traumatismes musculaires. Il est démontré que les étirements réalisés immédiatement après un entraînement de course à pied augmentent ces micro-traumatismes et peuvent même en générer de nouveaux. Ceci est mis en évidence par l’augmentation du taux de créatine kinase (CK) dans le sang, signe de myolyse et donc de destruction des fibres musculaires, auquel s’ajoute une diminution de la force musculaire . Le stretching se révèle donc être une source potentielle source de blessures graves .

Il est donc préférable, après l’effort, de ne pratiquer que quelques assouplissements de courte durée, très faible intensité, simplement pour redonner aux muscles leur  longueur initiale ainsi que leur souplesse.


5.    Alors quand s’étirer ?

Le stretching musculaire doit être, en-dehors des étirements activo-dynamiques, réalisé au plus tôt 6 heures après l’arrêt de l’activité musculaire, idéalement le lendemain et à distance d’une nouvelle séance de sport pour ne pas retomber sur ses effets négatifs. 


6.    Quels muscles étirer chez le coureur à pied ? 


Tous les muscles ne sont pas nécessairement à étirer chez le coureur. En effet, un triceps sural, ou mollet, qui se prolonge par le tendon d’Achille, ne sera pas a étirer, car il faut au maximum conservé ses propriétés élastiques pour avoir une foulée dynamique.  Il en va de même pour l’ensemble des muscles de la chaine postérieure, à savoir les ischio-jambiers et les fessiers, et ce pour les mêmes raisons.

En revanche, il peut être très intéressant d’étirer les deux gros muscles de la chaine antérieure, à savoir les psoas et les quadriceps car ils pourront limiter l’extension de hanche lors de la foulée, et donc réduire son dynamisme.

Les postures d’étirement qui suivent sont données à titre indicatif et peuvent bien sur être adaptées. 


a.    Posture d’étirement du psoas

  

Pour étirer un psoas droit, on se place en fente, pied gauche en avant et genou fléchi. La jambe droite est placée vers l’arrière, le pied au sol. L’étirement se fera en poussant le bassin vers l’avant et en gardant les épaules au-dessus des hanches.
La sensation d’étirement se fera sentir sur la partie haute du devant de la cuisse. 


b.    Posture d’étirement du quadriceps

En position debout, le dos et le bassin alignés, avec au besoin un appui en cas de déséquilibre.
Pour étirer un quadriceps droit, on vient attraper et ramener le talon droit vers la fesse droit sans faire de flexion de hanche. On veillera donc à pousser le bassin vers l’avant durant l’étirement.

7.    En conclusion

Les étirements musculaires sont à utiliser modérément dans les sports à déplacements angulaires faibles et lents tels que la course à pied, et pourraient même être source de blessures s'ils sont mal réalisés.

En revanche, ils trouvent tout à fait leur place dans la prise en charge des blessures musculaires. Il est possible de les démarrer dès la première semaine post-traumatique, ce qui permettra de réduire la fibrose cicatricielle. 

 

Jérome Bellanger, entraîneur au LMA 72 et Kinésithérapeute


 

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